Digital Learning : enough is enough !

Le 24 février 2017, le Groupe Epsilon organisait une activité sur la thématique du Digital Learning. Celle-ci était structurée en entonnoir :

  • « Digital Learning: enough is enough » (Sylvain Briol) : Une mode qui dure depuis trop longtemps ? A juste titre ?
  • « Be smart when you build your Digital strategy » (Luc Blondiaux) : Pourquoi et quand décider d’utiliser des outils digitaux dans votre stratégie de formation.
  • « The right tool for the right task » (Pascal Balancier) : Il existe de nombreux outils de digital learning, lequel choisir et pourquoi ?
  • « Let’s stop being boring » (Thierry Croix) : Les formations digitales ont un problème : elles ne sont pas motivantes.
  • Mini workshops pour découvrir des outils.

L’objectif de ce billet est de vous décrire le contenu de ma courte introduction.

1. Stop saying it’s new

Sur le devant de la scène depuis de nombreuses années…

On parle du Digital Learning comme la révolution de notre siècle, comme le must-have dans toute entreprise. Pourtant, rien de neuf à en croire l’extrait de l’émission d’Un jour dans l’histoire.

Je me suis donc demandé depuis combien de temps le monde scientifique s’intéressait à la question du digital dans l’enseignement. A en croire le moteur de recherche d’articles scientifiques Orbi (ULg), le première publication concernant le sujet date du 1998. (Celle-ci me ravit, à vrai dire, puisque l’évaluation c’est un peu mon dada…)

Les mass médias plus populaires que l’e-learning ?

Puis, je me suis dit que j’avais moi-même beaucoup appris grâce à l’outil digital principal de ma jeunesse : la télévision. Et l’émission de référence, entre l’histoire de la vie ou le bus magique, est bien entendu C’est pas sorcier. Je vous propose alors de comparer le nombre de personnes qui suivent la page Facebook de C’est pas sorcier au nombre de personnes qui suivent la page de l’Esprit sorcier. Cette dernière concerne l’héritage du bébé de Fred & Jamy : une communauté interactive qui oeuvre pour la vulgarisation scientifique inter-plateforme. Alors que l’Esprit Sorcier semble être tout à fait adapté à l’air du temps, le nombre de like est clairement supérieur (presque deux fois plus) sur la première, bien que l’émission ne soit plus diffusée depuis des années.

Alors, la formation digitale, est-ce vraiment une grande nouveauté ?

2. Stop saying it’s now

Dans cette section, je me pose la question suivante : sommes nous prêts pour le digital, aujourd’hui?

Notre gouvernement n’est pas prêt

Le twitter de notre ministre des affaires digitales, Alexandre de Croo, le montre bien : son dernier tweet sur son mur date du 20 octobre 2015 (et n’est pas de lui)…

Madame/Monsieur tout le monde n’est pas prêt

  • 86% des belges ont accès à internet
  • 1/3 ne sait pas utiliser un traitement de texte
  • 20% ne sont pas capables d’envoyer des courriers électroniques
  • 1/2 ne sait pas comment effectuer des paiements en ligne

On parle d’analphabétisme numérique … c’est grave et c’est une réalité.

Les entreprises ne sont pas prêtes

Je vous laisse profiter des séquences inoubliables (1 – 2 – 3) de la série humoristique britannique « The IT crowd » où vous verrez évoluer 2 informaticiens avec leur chef dans une grande entreprise…

Autre type d’organisation, autre problème : on peut lire le tweet d’une étudiante satisfaite d’avoir hacké l’ordinateur de l’école … une nouvelle fois. Comment former les jeunes à une utilisation sans danger (au minimum), efficace (a priori), voire professionnelle (idéalement) de l’IT si les enseignants et les responsables informatiques sont moins compétents qu’eux ?

Ces constats vous semblent-ils si éloignés de la réalité ? Pour travailler avec de nombreuses écoles et de nombreux DSI, je ne crois pas.

Même les gens motivés ne sont pas prêts !

Devant vous, un screenshot de l’application Slack – pas une mauvaise application en soi – qu’un membre du Groupe Epsilon a proposé d’utiliser pour préparer cette activité et, pourquoi pas, les suivantes.

Ce fut la Nième application proposée : pearl tree, framindmap, forums wordpress, … J’en passe. Et à nouveau, elle n’a pas pris.

Conclusion, les outils informatiques ne fonctionnent que si tout le monde en veut, ou s’ils sont institutionnalisés.

3. Stop saying it’s magic

In a world of instant gratification and where an alternative website is just a mouse click away website owners need to find ways to firstly grab the attention of a user, and then keep it for long enough to get your message across. If you don’t, their cursor will be heading to the back button and on to a competitor in the blink of an eye. _  The Guardian

Ou comme disait Thierry Croix pendant son intervention du 24/02 : contrairement aux mythes urbains qu’on peut lire à gauche à droite, nous sommes capables de rester concentrés longtemps. Si le participant se déconcentre, c’est que ce n’était pas bon…

On se MOOC de qui ?!

On nous parle des MOOC à toutes les sauces mais saviez-vous que :

  • ils ne sont pas révolutionnaires…
  • seuls 10% des personnes qui commencent un MOOC le terminent
  • par définition, le but est de toucher beaucoup de monde, ce qui pose le problème de gérer toutes ces interactions en même temps.

Vous devez sourire et vous dire que je ne vous apprends rien… Et ils savent que vous savez. C’est pourquoi certaines plateformes, comme edx, vous proposent de suivre gratuitement des cours, mais vous font payer les certifications avec l’argument commercial que ça vous permettra de vous motiver à aller au bout du cours.

Bref, selon le Harvard Business Review, les MOOC seraient une alternative seulement pour les élèves très motivés et particulièrement matures. Mais ceux-ci pourraient également prendre un livre et étudier la matière par eux-mêmes.

Quoi qu’il en soit, il n’y a pas que les MOOC qu’on abandonne… J’ai déjà montré l’exemple de Slack, en voici un autre : la communauté Google + du groupe elearn² (passionnés de l’e-learning et des mooc).

Réinventer la roue ?

Les LMS ou autres logiciels d’apprentissage se multiplient. Il y a quelques temps, Claroline était probablement la plus populaire dans les organisations (que je connaissais). Aujourd’hui, elle est détrônée par Moodle : une plateforme qui propose de (très) nombreux outils. Trop ? Sont-ils vraiment adaptés à la manière d’apprendre et de gérer l’information aujourd’hui ? Et ce avec une UX qui laisse fortement à désirer, selon de nombreux utilisateurs d’organisations différentes que je côtoie. Alors comment cet outil devient-il le leader malgré tout ? Le prix, pardi.

D’autres logiciels font le buzz, les uns après les autres. Prezi en est un bon exemple et je l’utilise moi-même énormément. Le problème, dont le bouton « PowerPoint » visible sur l’mage est le symptôme, est l’import-export incessant qui tend à se produire. On change d’outil sans changer le contenu, la structure et la formation en tant que telle.

Le jeu en vaut-il la chandelle ?

Enfin, je ne pourrais pas terminer cet article sans remettre aussi en question les serious game. Alors que les stands d’entreprises réalisant des serious game représentaient à peu près 30% des stands de l’Ilearning Forum à Paris début 2017, je reste dubitatif. Je constate en effet que la plupart des « activités » sont en réalité des QCM avec un fond d’écran 3D qui aide à la mise en situation, ou des jeux relativement éloignés de la réalité où les choix semblent téléphonés, ou bien pour lesquels les gamers ont de meilleurs réflexes que les non-initiés.